Femme du jour : Mai Li Bernard

À l’occasion de la journée internationale des droits des femmes, la Mission Tramway dresse le portrait d’une artiste inspirante et indépendante. Coup de projecteur sur Mai Li Bernard, l’illustratrice qui habillera les stations du prolongement du T3b.

Vous pouvez enfin mettre un visage et un nom sur toutes les illustrations colorées des stations du T3b ! Après sa première collaboration avec la RATP sur le tronçon Nord du T3b, Mai Li poursuit son exploration graphique en dessinant les édifices et équipements iconiques des 16e et 17e arrondissements.

Mai Li dessine depuis qu’elle est petite : « c’est une zone qui m’appartenait dès l’enfance et dans lequel je pouvais me réfugier ». Elle fait une mise à niveau en Arts appliqués avant d’étudier à l’École européenne supérieure de l’image d’Angoulême. « J’ai découvert énormément de choses durant mes études, et j’ai décidé de continuer dans cette voie-là. »

En ce 8 mars, la Mission Tramway lui pose 8 questions.

Comment vous définissez-vous ?

Être indépendante, c’est une liberté ! Je travaille à mon compte, à mon rythme, avec plein de personnes différentes. Mes projets, tous intenses, vont être sur du long terme ou sur de très petites périodes. Entre deux commandes, je travaille sur des sujets personnels. Je ne compte pas mes heures de travail. Mais je sais aussi m’autoriser une journée dans la semaine.

En revanche, comme je suis très dépendante des propositions qu’on peut me faire, je ne peux pas m’empêcher de regarder mes mails ou répondre aux appels quand je suis en vacances. Il ne faut pas passer à côté d’une opportunité.

Comment définissez-vous votre style artistique ?

Je ne sais pas si on peut vraiment parler de style artistique. Pour moi, l’habillage des stations est un projet de signalétique. Dans ma manière de représenter les choses, il y a toujours une certaine simplicité. J’utilise très peu de formes. Je travaille avec un nombre de formes limitées que je vais associer. Mon travail est assez épuré, simplifié et codifié.

Il rejoint également plusieurs disciplines : la bande dessinée, l’illustration jeunesse, le graphisme, le collage… J’aime explorer de nouveaux terrains artistiques. L’épuration qui revient dans mon travail est toujours présente dans mes divers projets, même si le média change. Quand je travaille pour le livre ou quand je travaille pour de l’espace public, les enjeux, les cibles et les échelles ne sont pas les mêmes.

Pourquoi vous ?

Je n’avais jamais fait de travail comme ça [NDLR : pour le projet d’habillage des stations du T3 Nord], si conséquent, sur la place publique. J’étais assez surprise par cette sollicitation et en même temps, j’ai trouvé ça très stimulant.

Forte du succès de mes précédentes œuvres, j’ai été recontactée. La volonté était de poursuivre le travail que j’avais déjà établi antérieurement. Je suis restée sur la même identité graphique en l’adaptant à l’architecture et la vie du quartier que je souhaitais mettre en avant.

Comment avez-vous choisi les équipements ?

J’ai fait plusieurs allers-retours à Paris pour déambuler dans les quartiers, prendre le pouls et vivre l’ambiance. Je viens souvent à Paris, mais ce ne sont pas forcément des quartiers que je fréquente. Ainsi, c’est toujours intéressant de découvrir des choses vers lesquelles on ne va pas spontanément. Souvent, je me retrouve à travailler pour des choses auxquelles je n’aurais pas pensé toute seule.

À partir de ces déambulations, j’ai entrepris un parcours plus attentif pour essayer de mettre en lumière le patrimoine urbain intéressant à mes yeux. C’est un travail très subjectif. Au-delà de l’aspect esthétique, j’ai choisi de représenter des monuments juste parce qu’ils sont imposants dans l’espace public. Ils sont facilement repérables et reconnaissables. J’ai voulu mettre l’accent sur des détails qui ne sont pas forcément visibles au premier abord.

J’ai proposé ma propre vision. C’est peut-être différent pour les riverains qui habitent le XVIe ou le XVIIe.

 

Le Campus Paris Champerret et le Palais des Congrès

Comment avez-vous travaillé ?

Pour ce projet, j’ai travaillé exclusivement sur Adobe Illustrator. Dans ma pratique personnelle ou pour d’autres types de commande, je fais beaucoup de collage. Pour ce type de projets, signalétique et graphique, je vais privilégier le numérique. Je dois être concise dans la représentation. Et puis, l’échelle et le format sont imposants.

 

Gare de Neuilly
La « libellule »
La marquise à la place Stuart Merrill
La tour d’exercice, en face de la caserne
des Sapeurs-Pompiers

Sur ce nouveau tracé du T3b, y a-t-il une œuvre dont vous êtes particulièrement fière ?

Je vois ce travail comme un ensemble. Il n’y a pas forcément un visuel qui doit prendre le pas sur les autres. Cependant, j’ai pris plaisir à valoriser certains objets singuliers. Par exemple, sur le boulevard Gouvion Saint-Cyr, un immeuble d’habitations Art déco de l’architecte Raymond Perruche, présente des garde-corps en fer. J’ai décidé de les représenter sur les parois latérales des abris.

Vous faites référence à l’Ymagier. Pourquoi ?

Ymagier avec un –y est une revue littéraire, de la fin du XIXème siècle, initiée par Rémy de Gourmont et Alfred Jarry. La revue contenait des textes et des images. Je fais référence à cet Ymagier, mais surtout au métier « imagier ». Au Moyen Âge, c’était celui qui réalise des images. Sur ce projet, j’ai essayé de repérer des éléments remarquables aux abords du passage du tramway et d’en faire des images reconnaissables. C’est vraiment une proposition d’imagier qui fait écho aux quartiers traversés.

La première portion [NDLR : du tronçon du T3 Nord] s’appelle Ymagier. Cette deuxième est Ymagier 2. Je n’ai pas souhaité changer de titre. On reste sur le même projet. Les quartiers traversés changent mais pas la démarche artistique.

Quels sont vos projets artistiques pour le futur ?

Vendredi dernier est sorti L’Abeille de Saint-Simon aux éditions 3oeil. Les textes d’Alice Brière-Haquet et mes illustrations ont formé un petit livre jeunesse philosophique.